TOPPI LE MECONNU

Sergio Toppi est un auteur méconnu. Et c'est bien dommage. Car son talent a notamment inspiré des dessinateurs comme Druillet ou Rosinski, dont les albums Vuzz (pour le premier) et Le grand pouvoir du Chninkel (pour le second) doivent beaucoup au trait fantasmagorique, élégant et puissant, du maître italien. Le dessin de Toppi se caractérise en effet par une étonnante maîtrise des contrastes et un encrage à base de hachures et d'aplats de noir. Précis et envoûtant, il n'est pourtant qu'un support.

Ce maître de la BD italienne est, comme  ses contemporain Manara, Pratt, Serpieri ou Crepax, un auteur à part entière. Ses récits indiens, progressivement regroupés par les éditions Mosquito, démontrent à eux seuls son talent de raconteur d'histoire. L'un des derniers volumes parus, Naugatuck 1757, dégage une force poétique digne de Pieds nus sur la terre sacrée. La publication de ce recueil de textes indiens a rappelé les fondements d'une civilisation où les considérations politiques et historiques s'estompent au profit d'une harmonie de l'homme et de la nature, dans laquelle la terre devient une création sacrée. 

La sagesse profonde de cette anthologie entre en résonnance avec les aspirations des tenants d'une façon de vivre basée sur le respect de la nature et des êtres qui y vivent. Les récits mis en image par Toppi, témoins de l'arrivée de l'homme blanc dans les territoires des Indiens d'Amérique, en sont une incomparable illustration. Leur compilation est l'opportunité de les (re)découvrir. Il serait dommage de s'en priver.