OUBLI ET MÉMOIRES
Les Indiens ont longtemps été indissociables des westerns. Au cinéma comme en BD. Mais ces médias peuvent se conjuguer heureusement avec de passionnants retours historiques. C'est le cas de deux albums récents, qui retracent de mémorables épisodes oubliés.
Dans Capitaine perdu (deux tomes parus chez Glénat), Jacques Terpant revient sur la présence française en Amérique et la cession de ces territoires aux Anglais, en 1763. Cette épopée méconnue est magnifiquement restituée dans ces deux tomes, où l'empathie des soldats du roi de France fit des "sauvages" du cru d'indéfectibles alliés, là où l'armée anglaise distribuait des couvertures infestées par la variole, afin de faire place nette pour les colons du roi Georges... Il en résulta un siècle d'une Amérique franco-indienne, dont la trace se perdit dans l'oubli au fil des années dans ces contrées immenses du grand ouest, où les bisons coulaient comme des fleuves.
Avec les mémoires de Géronimo (éditions Delcourt), le dernier grand résistant apache à l'Homme blanc, l'Histoire fait un bond d'un siècle et demi. Mort en 1909, le chef de guerre des Chiricahuas symbolise l'antagonisme difficilement réductible de la "civilisation" débarquée de la vieille Europe avec les natifs du continent monde américain. Ennemi juré des Mexicains, qui massacrèrent sa première famille, puis des Américains, ce combattant-né se révèle au fil des pages un homme aussi intelligent qu'attachant. Inspiré des "mémoires" de Géronimo, recueillies par un professeur américain, ce roman graphique manque malheureusement de relief, tant narrativement que graphiquement.